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30 novembre 2014 7 30 /11 /novembre /2014 19:22

 

larmes.jpg           Veiller. Premier mot de ce temps de l'Avent.

          Veiller comme on veille toute une nuit à guetter l'aurore, le rayon de soleil, la pointe de lumière qui jaillit de l'ombre, à l'horizon.

           Veiller comme on veille l'enfant qui dort, ou le silence de la nuit, le malade ou le vieillard, l'être aimé, le retour d'un ami, la bonne nouvelle ou la mauvaise.

         Veiller, ou lutter. La veille est un combat. Contre le sommeil, contre la fatigue, contre le temps, contre l'impatience, contre la lassitude, contre la désespérance. Veiller, c'est espérer, malgré tout, envers tout. Le veilleur est un lutteur.

           Je ne parle pas de ceux qui veillent en faisant la fête, en se laissant étourdir par les musiques à tue-tête ou les lumières criardes, par le néant des papiers glacés et les illusions médiatiques. Ceux-là ne veillent pas, et même s'ils traversent la nuit, le bruit et l'inconsistance les ont endormis. Aveuglés, ils ne voient pas l'important, ils passent à côté de l'essentiel. Ils se shootent et rêve d'un autre monde, d'un ailleurs, et perdent de vue la réalité. Avouons que nous sommes de ceux-là aussi, parfois, peut-être trop souvent. Aveuglés comme ceux dont parle Isaïe : « Pourquoi, Seigneur, laisser nos cœurs s'endurcir ? Nous nous sommes égarés... nous étions desséchés comme des feuilles. »

            L'Evangile nous appelle à veiller. Et donc à rester. A lutter. A être présent. A ne pas quitter le poste. Le veilleur ne dort pas. Il est tendu vers ce qui n'est pas encore là. Et les yeux fatiguent, et piquent, et deviennent rouge... jusqu'aux larmes, quand la veille se fait longue. Larmes de fatigue à force d'attendre, ou de joie devant la nouvelle, ou de tristesse... Larmes qui lavent le regard. Et changent la vision. Elles embrument les yeux, mais gouttes transparentes, elles disent combien la personne entre tout entière en émotion, en résonance, en empathie. Avec l'enfant, avec le malade, avec le vieillard, avec l'être aimé, avec la situation particulière, avec l'injustice ou avec la justice enfin recouvrée. La larme dit que tout le corps et tout l'être vibrent. « Heureux ceux qui pleurent... » Entrée en transparence avec l'autre, celui qu'on attendait, ce qu'on n'attendait plus, ce pour quoi on luttait. Ce qui n'était qu'espérance, ce qui était toute espérance, et qui est là désormais. « Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge du corps, du corps que nous sommes, du corps en relation, qui touche, qui aime, qui sent et ressent, qui imagine et se souvient, qui fait confiance et qui espère. Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge des sens, et de ce sixième sens qu'est l'art d'être présent à la présence, d'être là, ici et maintenant, présent à la présence d'autrui, à la présence de Dieu. Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge de l'incarnation, de notre condition limité, finie, et de ce grand désir d'infini qui l'habite. C'est faire l'éloge de l'incarnation de Dieu qui choisit d'habiter la maison des hommes, leur maison de chair et de peau, toute fragile et mortelle, parce qu'il l'aime et la trouve belle. Faire l'éloge des larmes, c'est nous souvenir que le Dieu confessé par les chrétiens est un Dieu qui pleure, à cause des hommes, avec les hommes, pour les hommes. Faire l'éloge des larmes, c'est à la suite de notre Dieu et avec lui aimer ce temps, aimer ce monde, aimer notre condition de chair, de sang, de larmes et de joie. »1 « Heureux ceux qui pleurent... », et malheureux les yeux secs, les yeux qui ne voient plus, qui ne sentent rien, qui ne vibrent pas, qui restent insensibles. Malheureux les yeux mécaniques comme ceux des caméras vidéo, qui analysent et décortiquent, mais ne voient pas, et ne savent pleurer. Malheureux les yeux secs et emportés par le sommeil.

           Là est le programme de notre temps d'avent. Veiller. Veiller sans retenue. Veiller sans se lasser. Veiller sans se décourager. Veiller. Veiller jusqu'aux yeux qui piquent et jusqu'aux larmes, pour qu'elles viennent faire leur travail : enlever toutes les couches superficielles de visions que nous avons, et enfin nous voir, et Le voir. Lui, Celui qui vient : la Lumière, le faisceau lumineux tant attendu dans l'horizon trop obscure de nos vies et du monde.

           Chemin d'avent, chemin de vie. Chemin qui s'ouvre à nous. Vie qui s'ouvre à nous. Comme une aventure, un challenge, un défi. Joyeux. Osé. Beau. Pas à pas, gagner en transparence pour découvrir La Lumière et l'accueillir. Et ne pas louper le rendez-vous, puis la rencontre, puis l'amitié, puis le voyage avec Lui qui se donne déjà à rencontrer, là, en ton frère, ta sœur, ton voisin...

          L'horizon de Noël pourra nous aveugler et nous détourner, si nous accordons trop de place aux néons, à la fête consumériste, et aux catalogues de bouffe et de jouets. L'horizon de Noël pourra nous intriguer et nous attirer, si nous distinguons dans le lointain clair-obscure se dessiner la venue d'un enfant changeant mystérieusement le cours du temps. Combien nous faudra-t-il de veille et de larmes, pour percevoir, dans le brouhaha des préparatifs, la douceur de cette lumière ?

           Le choix est là, à toi de le faire, ou à nous de le faire ensemble. « Aucun don de grâce ne nous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre Seigneur Jésus-Christ. C'est lui qui vous fera tenir fermement jusqu'au bout », disait l'apôtre Paul. Bonne Nouvelle : celui que nous cherchons est déjà là, avec nous, pour faire le chemin. Et nous guider à lui.

           Veillez ! Veillons ! A en devenir humain, vivants et en alerte. L'endormis loupe le rendez-vous, le veilleur pleure de la rencontre enfin advenue. Un temps d'Avent pour préparer nos cœurs et nos corps à l'événement espéré. Un temps d'Avent pour vivre déjà de tout notre cœur et de tout notre corps la rencontre inouïe d'un Dieu qui se fait homme.

           Amen

P. Benoît Lecomte

1Anne Lécu, in Cinq éloges de l'épreuve, Albin Michel, 2014, p77

 


 

 

Livre d'Isaïe 63,16b-17.19b.64,2b-7.
Tu es, Seigneur, notre Père, notre Rédempteur : tel est ton nom depuis toujours.
Pourquoi Seigneur, nous laisses-tu errer hors de ton chemin, pourquoi rends-tu nos cœurs insensibles à ta crainte ? Reviens, pour l'amour de tes serviteurs et des tribus qui t'appartiennent.
Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais, les montagnes fondraient devant toi.
Voici que tu es descendu, et les montagnes ont fondu devant ta face.
Jamais on ne l'a entendu ni appris, personne n'a vu un autre dieu que toi agir ainsi envers l'homme qui espère en lui.
Tu viens à la rencontre de celui qui pratique la justice avec joie et qui se souvient de toi en suivant ton chemin. Tu étais irrité par notre obstination dans le péché, et pourtant nous serons sauvés.
Nous étions tous semblables à des hommes souillés, et toutes nos belles actions étaient comme des vêtements salis. Nous étions tous desséchés comme des feuilles, et nos crimes, comme le vent, nous emportaient.
Personne n'invoquait ton nom, nul ne se réveillait pour recourir à toi. Car tu nous avais caché ton visage, tu nous avais laissés au pouvoir de nos péchés.
Pourtant, Seigneur, tu es notre Père. Nous sommes l'argile, et tu es le potier : nous sommes tous l'ouvrage de tes mains.



Psaume 80(79),2-3bc.15-16a.18-19.
Berger d'Israël, écoute,
toi qui conduis ton troupeau, resplendis !
Réveille ta vaillance
et viens nous sauver.

Dieu de l'univers reviens !
Du haut des cieux, regarde et vois :
visite cette vigne, protège-la,
celle qu'a plantée ta main puissante.

Que ta main soutienne ton protégé,
le fils de l'homme qui te doit sa force.
Jamais plus nous n'irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !




Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 1,3-9.
Frères, que la grâce et la paix soient avec vous, de la part de Dieu notre Père et de Jésus Christ le Seigneur.
Je ne cesse de rendre grâce à Dieu à votre sujet, pour la grâce qu'il vous a donnée dans le Christ Jésus ;
en lui vous avez reçu toutes les richesses, toutes celles de la Parole et toutes celles de la connaissance de Dieu.
Car le témoignage rendu au Christ s'est implanté solidement parmi vous.
Ainsi, aucun don spirituel ne vous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre Seigneur Jésus Christ.
C'est lui qui vous fera tenir solidement jusqu'au bout, et vous serez sans reproche au jour de notre Seigneur Jésus Christ.
Car Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus Christ notre Seigneur.



Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 13,33-37.
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Prenez garde, veillez : car vous ne savez pas quand viendra le moment.
Il en est comme d'un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et recommandé au portier de veiller.
Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison reviendra, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin.
Il peut arriver à l'improviste et vous trouver endormis.
Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! »


 

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23 novembre 2014 7 23 /11 /novembre /2014 17:44

 

ChristRoi2.jpg          Nous avons lu cette page d'évangile au caté il y a 15 jours, et nous l'avons même mise en scène et jouée devant des personnes que nous avions invitées pour l'occasion, afin d'en discuter avec elle. Je me rappelle que je vous attendais dans l'église pour terminer notre rencontre ensemble, mais les échanges que vous aviez étaient riches et vifs, alors vous n'arriviez pas ! Car cette page nous renvoie tous à 1000 situations que nous vivons chaque jour et dans lesquelles nous nous retrouvons, tantôt brebis, tantôt chèvres. L’Évangile n'est pas une idée, un concept, une philosophie : elle est bonne nouvelle de relations concrètes et quotidiennes. Elle est la rencontre avec une personne, le Christ, qui se donne à approcher à travers tous nos frères et nos sœurs. Jean-Paul II avait dit, à l'aube de l'an 2000, que « c'est sur cette page, tout autant que sur la question de la justesse de sa foi, que l’Église mesure sa fidélité au Christ »1. Cette page d'Evangile nous rappelle qu'il ne suffit pas de parler de Dieu ou du Christ, de faire des théories sur la foi ou l’Église, d'apprendre des prières ou de savoir le « credo » par cœur. Encore faut-il aimer, et aimer concrètement. Le pauvre, l'affamé, l'étranger, le paumé, le prisonnier, le malade... Il n'y a aucune situation qui n'invite et n'appelle à aimer. Et le Christ, pauvre parmi les pauvres, se laisse approcher, nourrir, soigner, accueillir, écouter, reconnaître, aimer en chacun de ceux que nous rencontrons, mystérieusement, étrangement. Lui que l'on appelle « roi des rois », lui que nous fêtons aujourd'hui comme le « roi de l'univers » se plaît à venir à notre rencontre sous les traits de ceux qui sont les plus abîmés et les plus dépendants. Aimer ainsi, concrètement, n'est donc pas « faire la charité », comme l'on dit parfois, et se donner bonne conscience en faisant de bonnes actions. Aimer ainsi, s'est se laisser approcher par Jésus le Christ lui-même, le rencontrer et nouer une amitié avec lui.

           Cette page d'Evangile est magnifique, et son invitation doit nous transporter et nous inviter vraiment à aimer toujours davantage. Il y a pourtant quelque chose que je trouve terrible dans ce récit, et qui pourrait même me faire peur. C'est qu'aucun des personnages n'a su réellement ce qu'il faisait avant de se retrouver au dernier jour devant le roi. Autrement dit, nous n'avons aucune conscience de ce que nous faisons réellement, ni en bien, ni en mal. Et cette situation peut générer de l'angoisse, si on la prend au sérieux ! Nous serions comme vivant dans le noir, totalement aveugles et inconscients de ce que nous faisons et de la réalité que nous vivons... et ça ne serait qu'à la fin des temps que l'on serait jugé, sans aucune préparation préalable ! Qui est-il, ce roi qui ne prévient pas à l'avance de ce qu'il va faire de nous et ne nous aide pas à être meilleurs ? Qui est-il, ce Dieu qui ne donne aucune chance à ceux qu'il envoie au châtiment éternel de changer leur regard et leur cœur ?

           Pourtant, en remettant cette page dans la perspective de tout l’Évangile, n'y a-t-il pas là aussi, là encore, une bonne nouvelle ? Naturellement, nous voudrions être plutôt du côté des brebis qui reçoivent l'héritage du royaume plutôt que les chèvres qui sont envoyées au feu... mais ce n'est pas pour elles que le Christ nous a rejoint. « Je ne suis pas venu pour les juste, mais pour les pécheurs, je ne suis pas venu pour les bien-portants, mais pour les malades », dira ailleurs Jésus. Autrement dit, il n'est pas venu pour ceux qui n'ont pas besoin de lui, mais pour les autres, ceux qui, sans lui, resteraient enfermés dans leur mort. Et ne serait-elle pas là, la véritable grandeur de sa royauté ? N'est-ce pas ce que Saint Paul peut nous suggérer dans sa lettre aux Corinthiens, lorsqu'il rappelle que « le Christ est ressuscité d'entre les morts pour être parmi les morts le premier ressuscité »... et qu'il a tout pouvoir sur tous les pouvoirs et sur la mort ?

           Jésus Christ n'accède pas à la plénitude de sa royauté en prenant un trône au milieu des bons et des vivants. Il va chercher sa royauté sur la croix, dans le malheur et jusque dans la mort, pour aller chercher ceux qui étaient morts (et nous le sommes tous un peu, à chaque fois que nous désespérons, que nous n'aimons plus, que nous baissons les bras, que nous ne vivons pas la justice, que nous n'accueillons pas celui qui a faim, soif, sommeil, qui est étranger, malade ou prisonnier...). Jésus devient roi en allant chercher ceux qui se sont éloignés de lui et en ramenant tout le monde à la lumière et à la vie. C'est là, dans la résurrection d'entre les morts, qu'il manifeste toute sa puissance... et qu'il prend soin de toute l'humanité, de tous les hommes, veillant sur chacun comme « sur ses brebis, les délivrant de tous les endroit où elles ont été dispersées un jour de brouillard et d'obscurité » (Ez 34).

           Fêter le Christ roi de l'univers, c'est se placer dans la puissance de cette résurrection, de cette immense victoire de la Vie qui va chercher par le pardon et la miséricorde même ceux qui n'arrivent plus à aimer ou qui n'ont pas réussi à aimer.

           Malgré sa mention du châtiment éternel, l’Évangile ne nous fait pas trembler. Elle nous invite au contraire à être toujours davantage accueillant à la vie de l'Esprit en nous, à la simplicité des relations et à la fraternité humaine, en sachant que même si nous n'arrivons pas à faire tout ce que nous voudrions faire, ou à être ce que nous voudrions être, le Christ est bien le roi, c'est lui qui vient nous délivrer, et aucune puissance ne pourra lui résister, toutes seront et sont déjà sous ses pieds.

           Que cette espérance nous guide, les uns et les autres, les uns avec les autres, à vivre toujours plus simplement les relations entre nous et avec Dieu. Dans le service, l'attention, la bienveillance... et le bonheur d'être ensemble, signe de vie éternelle déjà aujourd'hui.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

1Novo millennion ineunte, Jean-Paul II, 2001, n° 49

 


Livre d'Ézéchiel 34,11-12.15-17.
Parole du Seigneur Dieu : Maintenant, j'irai moi-même à la recherche de mes brebis, et je veillerai sur elles.
Comme un berger veille sur les brebis de son troupeau quand elles sont dispersées, ainsi je veillerai sur mes brebis, et j'irai les délivrer dans tous les endroits où elles ont été dispersées un jour de brouillard et d'obscurité.
C'est moi qui ferai paître mon troupeau, et c'est moi qui le ferai reposer, déclare le Seigneur Dieu.
La brebis perdue, je la chercherai ; l'égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la soignerai. Celle qui est faible, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître avec justice.
Et toi, mon troupeau, déclare le Seigneur Dieu, apprends que je vais juger entre brebis et brebis, entre les béliers et les boucs. »



Psaume 23(22),1-2ab.2c-3.4.5.6.
Le Seigneur est mon berger :
je ne manque de rien.
Sur des prés d'herbe fraîche,
il me fait reposer.

Il me mène vers les eaux tranquilles,
et me fait revivre ;
il me conduit par le juste chemin
pour l'honneur de son nom.

Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi,
ton bâton me guide et me rassure.

Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis ;
Tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante.

Grâce et bonheur m'accompagnent
tous les jours de ma vie.
J'habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.  




Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 15,20-26.28.
Frères, le Christ est ressuscité d'entre les morts, pour être parmi les morts le premier ressuscité.
Car, la mort étant venue par un homme, c'est par un homme aussi que vient la résurrection.
En effet, c'est en Adam que meurent tous les hommes ; c'est dans le Christ que tous revivront,
mais chacun à son rang : en premier, le Christ ; et ensuite, ceux qui seront au Christ lorsqu'il reviendra.
Alors, tout sera achevé, quand le Christ remettra son pouvoir royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal.
C'est lui en effet qui doit régner jusqu'au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis.
Et le dernier ennemi qu'il détruira, c'est la mort,
Alors, quand tout sera sous le pouvoir du Fils, il se mettra lui-même sous le pouvoir du Père qui lui aura tout soumis, et ainsi, Dieu sera tout en tous.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 25,31-46.
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire.
Toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres :
il placera les brebis à sa droite, et les chèvres à sa gauche.
Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : 'Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde.
Car j'avais faim, et vous m'avez donné à manger ; j'avais soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais un étranger, et vous m'avez accueilli ;
j'étais nu, et vous m'avez habillé ; j'étais malade, et vous m'avez visité ; j'étais en prison, et vous êtes venus jusqu'à moi ! '
Alors les justes lui répondront : 'Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu...  ? tu avais donc faim, et nous t'avons nourri ? tu avais soif, et nous t'avons donné à boire ?
tu étais un étranger, et nous t'avons accueilli ? tu étais nu, et nous t'avons habillé ?
tu étais malade ou en prison... Quand sommes-nous venus jusqu'à toi ? '
Et le Roi leur répondra : 'Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces petits qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait. '
Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : 'Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le démon et ses anges.
Car j'avais faim, et vous ne m'avez pas donné à manger ; j'avais soif, et vous ne m'avez pas donné à boire ;
j'étais un étranger, et vous ne m'avez pas accueilli ; j'étais nu, et vous ne m'avez pas habillé ; j'étais malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité. '
Alors ils répondront, eux aussi : 'Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu avoir faim et soif, être nu, étranger, malade ou en prison, sans nous mettre à ton service ? '
Il leur répondra : 'Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces petits, à moi non plus vous ne l'avez pas fait. '
Et ils s'en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes, à la vie éternelle. »

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15 novembre 2014 6 15 /11 /novembre /2014 18:30

 

images-blog-3-7742.JPG           Jésus vient. Dans l'évangile il parle de sa venue, et le texte d'évangile n'est pas un texte, il est Parole vivante. Jésus vient, et si nous l'entendons dire qu'il vient, c'est qu'il vient, aujourd'hui, dans une vivante actualité pour nous. Il ne suffit pas d'en rester à la proclamation que nous chanterons tout à l'heure : « il reviendra ! ». Sa venue n'est pas de l'ordre du futur, même si nous espérons aussi le voir mieux demain, mais elle est de l'ordre du présent, de l'aujourd'hui, de maintenant. Jésus vient. C'est la Bonne Nouvelle qui vient nous rejoindre maintenant, alors même que nous avons peut-être vécu cette semaine sans trop nous en soucier ! Mais qu'importe, l'événement nous est rappelé par la bouche même de Jésus : il vient. La parabole ensuite qu'il développe n'est peut-être qu'une mise en scène de sa venue, en nous posant une question : celle de notre ouverture à cette venue, de notre accueil à sa présence.

           Dans cette parabole, je trouve mises en relief deux attitudes, dans lesquelles nous pouvons nous retrouver tous.

        La première attitude, c'est celle de l'homme qui n'a pas fait fructifier son talent. Cet homme nous pose une question toute simple : quelle image te fais-tu de Dieu ? « Seigneur, je savais que tu es un homme dur... j'ai eu peur ». De cette image, découle son raisonnement et son comportement. Ce qui est vrai dans toutes nos relations l'est aussi certainement dans notre relation avec Dieu. Ne rencontrons-nous pas les autres à la hauteur où nous les cherchons ? Si je me dis que telle personne est intelligente, je la trouverai certainement intelligente. A l'inverse, si je m'attend à ce qu'elle dise une bêtise, sûrement pourrais-je relever toutes les bêtises de son discours. De même si je m'attend à ce qu'elle soit violente, ou égarée, ou douce, ou joyeuse, ou dynamique, ou ringarde, ou jeune, ou décalée... Il n'est pas facile de dépasser l'image que nous nous faisons des gens que nous rencontrons. La rencontre se vit à travers ce filtre, qui n'embrasse jamais, et de loin, la totalité de l'être. Il en est de même avec Dieu. Si mon image de Dieu est celle d'un Dieu miséricordieux, bon, aimant, j'aurais certainement plus de joie à le laisser venir à moi que si je m'imagine un Dieu dur, violent, tranchant. L'une des images me conduit à une relation qui mène vers la vie, la joie et la fécondité, l'autre vers la peur, l'enfermement et la mort. Et ces images, aussi diverses soient-elles, traversent toutes notre esprit, et façonnent toutes notre façon d'accueillir sa venue au milieu de nous et en nous. Comment dépasser ces images et ces a priori ? Comment aller plus loin dans l'accueil de sa présence qu'en refaisant sans cesse confiance en celui qui, malgré tout, accompagne l'humanité – sa création - depuis toujours ? Et en nous libérant de ce qui nous empêcherait de vivre de cette Bonne Nouvelle de sa venue ? En allant à la vérité de ce qu'il est en lui-même et de son mouvement : il vient.

           La deuxième attitude est mise en valeur par les deux hommes qui ont fait fructifier leurs talents. Cette attitude pose la question de la façon avec laquelle nous faisons entrer Dieu en nous.

          Une lecture simple de la parabole est de l'entendre d'une façon que j'appellerai « managériale » : il faut faire fructifier nos talents, le jeu de mot en Français nous invitant à développer les dons et les capacités que nous avons reçus. C'est une lecture possible, morale, qui peut amener à écrire comme le livre des proverbes en définissant, pourquoi pas, les talents que nous devinons chez les uns et les autres pour que ceux-ci les développent : « La femme vaillante enrichira son mari au lieu de lui coûter... elle travaille avec entrain, vaine est sa beauté, mais sur la place publique on fera l'éloge de son activité... » Ces phrases me rappellent une prière écrite sur un écriteau : « Seigneur, donne-moi la santé, et à ma femme la force de travailler »... Notre conscience moderne et le décalage culturel d'avec la rédaction du livre voit la limite de cette lecture, et nous comprenons la limite de cette façon d'accueillir Dieu en nous : on ne peut en rester à un niveau moral, là encore soumis aux filtres de notre éducation, de nos sociétés, de nos coutumes, de notre sens du bien...

          Saint Paul va plus loin, me semble-t-il, en déplaçant la question du niveau moral (qu'il ne quitte pourtant pas dans ses écrits) à un niveau existentiel. Quelle place a Dieu, quelle place à le Christ, quelle place a l'Amour Tout-Puissant en ma vie ?

           « Vous êtes des fils de lumière, des fils du jour ». Il s'agit donc non pas d'être productif avec ce qu'on a reçu, mais de faire entrer en nous la lumière et la vie. Cette lumière qui chasse l'ombre et les ténèbres. Cette lumière qui nous libère de ce qui nous entrave pour déployer ce que nous sommes - ou qui nous sommes. La Parole de Dieu de ce jour tient en un verbe : vivre. Peut-être davantage encore en une invitation, une exhortation : « vit ! » Quelques soient les difficultés que tu traverses (et chacun en traverse), les doutes, les questions, les problèmes grands ou petits, vit ! Jésus vient, et il est là, à la mesure où tu l'accueilles. Pas comme un magicien, mais comme un compagnon d'amour qui t'appelle à naître à toi-même et à vivre dans la confiance et la lumière. Nouvelle naissance de chacun, naissance permanente de chacun, appel de chacun à la vie. Je trouve toujours étonnante cette image des douleurs de la femme enceinte que Saint Paul prend à plusieurs reprise dans ces écris. Étonnante parce qu'elle vient d'un homme, Paul, et que ce n'est pas une image évidente pour un homme qui ne peut comprendre cette réalité de l'intérieur. Mais cette image est parlante et belle, parce qu'elle nous dit certes un arrachement douloureux de notre bulle sécurisante et douce, mais un arrachement pour l'événement d'un naissance que nous n'en finissons pas de vivre. Événement d'une promesse, d'un passage pascal, d'un aujourd'hui extraordinaire qui s'ouvre soudain à tout l'univers, d'une venue à la lumière.

           Jésus vient. Et il est là, dans l'ordinaire de nos vies, dans le quotidien de nos relations, dans l'intimité du dialogue de notre conscience avec lui, dans le silence et la poignée de main, dans l'écoute et la parole partagée, dans le désir le plus profond, dans la lumière de la beauté de nos vies, Il est là. Ne restons pas sourds ni aveugles à sa présence, laissons-nous gagner par lui, qui vient féconder nos vies et les mener, encore et encore, toujours, à sa lumière.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

 


 

Livre des Proverbes 31,10-13.19-20.30-31.
La femme vaillante, qui donc peut la trouver ? Elle est infiniment plus précieuse que les perles.
Son mari peut avoir confiance en elle : au lieu de lui coûter, elle l'enrichira.
Tous les jours de sa vie, elle lui épargne le malheur et lui donne le bonheur.
Elle a fait provision de laine et de lin, et ses mains travaillent avec entrain.
Sa main saisit la quenouille, ses doigts dirigent le fuseau.
Ses doigts s'ouvrent en faveur du pauvre, elle tend la main au malheureux.
Décevante est la grâce, et vaine la beauté ; la femme qui craint le Seigneur est seule digne de louange.
Reconnaissez les fruits de son travail : sur la place publique, on fera l'éloge de son activité.



Psaume 128(127),1-2.3.4-5c.6a.
Heureux qui craint le Seigneur
et marche selon ses voies !
Tu te nourriras du travail de tes mains :
Heureux es-tu ! A toi, le bonheur !

Ta femme sera dans ta maison
comme une vigne généreuse,
et tes fils, autour de la table,
comme des plants d'olivier.

Voilà comment sera béni
l'homme qui craint le Seigneur.
Que le Seigneur te bénisse tous les jours de ta vie,
et tu verras les fils de tes fils.




Première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens 5,1-6.
Frères, au sujet de la venue du Seigneur, il n'est pas nécessaire qu'on vous parle de délais ou de dates.
Vous savez très bien que le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit.
Quand les gens diront : « Quelle paix ! quelle tranquillité ! », c'est alors que, tout à coup, la catastrophe s'abattra sur eux, comme les douleurs sur la femme enceinte : ils ne pourront pas y échapper.
Mais vous, frères, comme vous n'êtes pas dans les ténèbres, ce jour ne vous surprendra pas comme un voleur.
En effet, vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour ; nous n'appartenons pas à la nuit et aux ténèbres.
Alors, ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 25,14-30.
Jésus parlait à ses disciples de sa venue ; il disait cette parabole : « Un homme, qui partait en voyage, appela ses serviteurs et leur confia ses biens.
A l'un il donna une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul, à chacun selon ses capacités. Puis il partit.
Aussitôt, celui qui avait reçu cinq talents s'occupa de les faire valoir et en gagna cinq autres.
De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres.
Mais celui qui n'en avait reçu qu'un creusa la terre et enfouit l'argent de son maître.
Longtemps après, leur maître revient et il leur demande des comptes.
Celui qui avait reçu les cinq talents s'avança en apportant cinq autres talents et dit : 'Seigneur, tu m'as confié cinq talents ; voilà, j'en ai gagné cinq autres. -
Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t'en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître. '
Celui qui avait reçu deux talents s'avança ensuite et dit : 'Seigneur, tu m'as confié deux talents ; voilà, j'en ai gagné deux autres. -
Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t'en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître. '
Celui qui avait reçu un seul talent s'avança ensuite et dit : 'Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n'as pas semé, tu ramasses là où tu n'as pas répandu le grain.
J'ai eu peur, et je suis allé enfouir ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t'appartient. '
Son maître lui répliqua : 'Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n'ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l'ai pas répandu.
Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l'aurais retrouvé avec les intérêts.
Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix.
Car celui qui a recevra encore, et il sera dans l'abondance. Mais celui qui n'a rien se fera enlever même ce qu'il a.
Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dehors dans les ténèbres ; là il y aura des pleurs et des grincements de dents ! '


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9 novembre 2014 7 09 /11 /novembre /2014 08:12

 

 

          L’Église fête aujourd'hui la « dédicace de la Basilique du Latran », la basilique de l'évêque de Rome, le pape. Étrange fête, à vrai dire. Idée saugrenue que de fêter une église, un bâtiment de pierres, aussi prestigieux soit-il. Mais nous saisissons bien, à travers les textes bibliques de la liturgie, qu'il ne s'agit pas de s'extasier devant des murs et des peintures, aussi bien bâtis et peintes soient-ils. La fête de ce jour nous invite à nous tourner vers l’Église que nous formons, la communauté humaine et spirituelle que nous sommes, vivante de l'Esprit du Christ et pélégrinante sur la terre... Cette Église faite « d'épaisseur humaine, avec son poids de péché, ses élans de grâce, son imprenable origine jusqu'en ses promesses actuelles : les héroïsmes et les saintetés de son histoire, ses crises et ses crimes, ses fiertés et ses hontes, ses insurrections et ses compromissions, ses enracinements et ses fécondations »1... L’Église que nous sommes, celle sur laquelle nous nous lamentons et celle avec qui nous nous réjouissons, la priante et l'active, la prophétique et la servante, celle de Rome et celle de nos quartiers, l'unique Église qui nous rassemble tous en une unique construction faite apparemment de bric et de broc mais qui tient grâce à sa tête qui se trouve être ses fondations : Jésus-Christ. « Vous êtes le temps de Dieu, et l'Esprit de Dieu habite en vous », n'hésite pas à dire saint Paul. Et les disciples, après la résurrection, de comprendre que le Temple dont parlait Jésus, c'était son Corps, son corps ressuscité vivant de l'Ecriture et du partage : l’Église. Celle de la Pentecôte, celle du grand large, de l'humanité de tous les temps et de tous les lieux, traversant les cultures, les continents, les histoires, les coutumes. Celle qui veut porter le message de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ à chaque homme avec un infini respect, une infinie bonté, avec simplicité et joie.

               Deux questions nous sont aujourd'hui posées, à l'occasion de cette fête.

           D'abord, à travers la lettre de saint Paul, la question de nos fondations. Quelles sont nos bases ? Sur quoi sommes-nous construits ? Cette question est posée à l’Église, l'universelle et la locale, jusqu'à notre petite communauté chrétienne, jusqu'à ces « Eglises domestiques » que sont nos familles. Sur quoi, sur qui sommes-nous fondés ? Sur qui nous appuyons-nous ? Où en sommes-nous de notre relation avec Jésus-Christ, le Fils Tout-Puissant d'amour, notre frère en humanité, le Ressuscité Vivant à jamais ? Où en sommes-nous de notre relation de confiance, intime, personnelle avec lui ? Les chrétiens habitués peuvent devenir des « habitués » de Jésus, plus que des « familiers ». Le risque est encore plus grand pour ceux qui travaillent en Église (les prêtres, les religieux et religieuses, les consacrés, les théologiens, les laïcs aux engagements de toutes sortes...) : Jésus peut devenir notre « gagne-pain » ! et nous des actifs associatifs... Où en sommes-nous de notre dialogue intérieur avec lui ? De l'écoute de sa Parole ? Est-il celui qui apaise notre cœur, nourri notre foi, notre espérance et notre charité, donne vie à notre existence ? Celui que nous remercions pour ce qui nous est donné, que nous célébrons dans nos liturgies ? Est-il ce « roc » sur lequel la maison ne tombe pas, la construction ne s'écroule pas, le Temple tient bon ?

           Et l'autre question nous est posée par l'attitude de Jésus. On a l'habitude de parler de Jésus ou d'entendre parler de lui en terme de douceur, de bienveillance et de pardon. On en a fait le « petit Jésus » doux et sucré... Et le voilà violent, chassant les marchands et les changeurs à coup de fouet, renversant les étales et les tables, brisant ce qui se trouve à sa portée. Un Jésus en colère vient faire le ménage. Quels noms ont-ils pu prendre, ces marchands et ces changeurs, figures de nos compromis, nos lourdeurs, nos inerties, nos certitudes, nos habitudes... Dans notre façon de faire, d'accueillir, de nous accueillir, dans nos relations, nos paroles, nos regards... Sûrement y en a-t-il, des choses à enlever ou à faire enlever par le Christ, pour qu'il vienne faire lui-même de notre humanité et de son Église « une maison de prière », c'est-à-dire une maison de simplicité et d'unité, de réconciliation et de paix, de communion et de louange.

           Nous en parlions le jour de la Toussaint, à l'occasion du lancement de la campagne pour les chantiers diocésains, les diagnostiques de nos églises nous obligent à faire des travaux pour sécuriser les locaux, mais aussi pour les rendre accessibles au plus grand nombre. L'image de la construction parle encore : notre Église, communauté chrétienne locale et universelle, est-elle accessible au plus grand nombre, à tous, même ? Le diagnostique est ici spirituel et pastoral, à faire à la lueur de l’Évangile, à l'écoute de l'Esprit et dans la fraternité du quotidien. Ne mettons-nous pas des barrières aux uns ou aux autres, à ceux que nous ne connaissons pas assez, qui ne comprennent pas nos plannings ou ne connaissent pas nos organisations ? Les pauvres et les petits – et chacun de nous l'est à sa façon - les fragiles et les handicapés, les malades et les rejetés ont-ils toute leur place ? Plus encore, sont-ils des pierres de fondations ? Car ce sont leurs visages et leurs conditions que Jésus a pris pour venir rejoindre notre humanité.

           La Parole de Dieu à travers ces textes de la Bible vient réveiller notre vie de chrétien et le baptême que nous avons reçu. Elle vient secouer la poussière de notre vie d’Église qui dépasse pourtant ce que l'on en voit. Car comment ne pas associer à notre quête tous ceux qui nous ont quitté, qui sont entrés dans la Lumière du Père, dans l’Église bienheureuse, et qui chantent la gloire de Dieu en continuant, j'en suis sûr, dans la connaissance de l'Amour tout puissant, à nous apprendre à aimer chaque jour, et à nous fier au Christ dans sa victoire sur la mort ? Ils sont là, ceux que nous allons nommer dans un instant. Comme autant de lumières venues du Père, devenus mystérieusement compagnons de nos routes. Ils sont là, dans un au-delà que nous connaissons déjà, parce que vécu dans l'Esprit qui anime l’Église et le cœur de chacun. Ils sont là, dans la vie qui nous attire à elle et que le Temple de Dieu n'enferme pas entre des murs, mais propose aux quatre vents du monde par la vie de l’Église.

           Que ceux qui nous ont quitté mais qui continuent d'être là à leur manière nous fasse découvrir la grandeur et la beauté de ce que nous avons à vivre, loin des marchands de toutes espèces et des changeurs de tous poils. Qu'ils nous apprennent dans la grâce de l'éternité à constuire jour après jour le Temple de Dieu sur sa fondation qu'est Jésus-Christ, pour la gloire de Dieu et la vie de toute l'humanité.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

1Robert Sholtus, Petit christianisme de tradition, Bayard, p 10.



Livre d'Ézéchiel 47,1-2.8-9.12.
Au cours d'une vision reçue du Seigneur, l'homme qui me guidait me fit revenir à l'entrée du Temple, et voici : sous le seuil du Temple, de l'eau jaillissait en direction de l'orient, puisque la façade du Temple était du côté de l'orient. L'eau descendait du côté droit de la façade du Temple, et passait au sud de l'autel.
L'homme me fit sortir par la porte du nord et me fit faire le tour par l'extérieur, jusqu'à la porte qui regarde vers l'orient, et là encore l'eau coulait du côté droit.
Il me dit : « Cette eau coule vers la région de l'orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux.
En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent.
Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède.



Psaume 46(45),2-3.5-6.8-9a.10a.
Dieu est pour nous refuge et force,
secours dans la détresse, toujours offert.
Nous serons sans crainte si la terre est secouée,
si les montagnes s'effondrent au creux de la mer ;

Le Fleuve, ses bras réjouissent la ville de Dieu,
la plus sainte des demeures du Très-Haut.
Dieu s'y tient : elle est inébranlable ;
quand renaît le matin, Dieu la secourt.

Il est avec nous, le Seigneur de l'univers ;
citadelle pour nous, le Dieu de Jacob !
Venez et voyez les actes du Seigneur,  
Il détruit la guerre jusqu'au bout du monde.




Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 3,9b-11.16-17.
Frères, vous êtes la maison que Dieu construit.
Comme un bon architecte, avec la grâce que Dieu m'a donnée, j'ai posé les fondations. D'autres poursuivent la construction ; mais que chacun prenne garde à la façon dont il construit.
Les fondations, personne ne peut en poser d'autres que celles qui existent déjà : ces fondations, c'est Jésus Christ.
N'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous.
Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira ; car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c'est vous.



Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 2,13-22.
Comme la Pâque des Juifs approchait, Jésus monta à Jérusalem.
Il trouva installés dans le Temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs.
Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs bœufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs,
et dit aux marchands de colombes : « Enlevez cela d'ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. »
Ses disciples se rappelèrent cette parole de l'Écriture : L'amour de ta maison fera mon tourment.
Les Juifs l'interpellèrent : « Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là ? »
Jésus leur répondit : « Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai. »
Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple, et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
Mais le Temple dont il parlait, c'était son corps.
Aussi, quand il ressuscita d'entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu'il avait dit cela ; ils crurent aux prophéties de l'Écriture et à la parole que Jésus avait dite.

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1 novembre 2014 6 01 /11 /novembre /2014 11:00

 

 

 tous-saints.jpg        Tous saints ! Voilà ce que nous proclamons avec toute l’Église aujourd'hui : tous saints ! Cette nouvelle ne vient pas de nous : elle ne peut que venir du regard de Dieu sur nous et sur chaque homme. Cette nouvelle vient transformer le regard que nous posons sur nous-mêmes et sur les autres : tous saints !

           Non pas que nous ayons acquis comme par magie un niveau de pratique morale et religieuse parfaite. Non pas que nous soyons sans défaut, sans péché, sans compromis, sans ambiguïté. Non pas que nous soyons devenu de parfaits chrétiens d'image d’Épinal. Mais l’Église toute entière, celle d'hier, d'aujourd'hui et demain, proclame, sous l'inspiration de l'Esprit Saint qui l'anime, que nous sommes tous saints. Tous. Car il en va de la vie de tout homme dans son humanité portée par le souffle de Dieu. Et je ne peux imaginer que Dieu abandonne quiconque, même l'homme au cœur de pierre. Je ne peux m'imaginer que Dieu n'aime plus l'homme au cœur désorienté, aussi profonde soit la désorientation. Je ne peux imaginer que Dieu face du tri dans l'humanité qu'il a lui-même créé, appelé, et qu'il fait vivre à chaque seconde jusqu'aux siècles sans fin.

           Quand avec l’Église toute entière nous proclamons « Tous saints », nous entrons dans le regard et l'amour de Dieu pour nous. Aussi affligeant parfois, attristant, désespérant que soit pour nous le monde des hommes dans leurs relations, dans leurs constructions, dans leur vie affective, familiale, sociale, religieuse, proclamer « tous saints », c'est proclamer « tous saints ». Pas du bout des lèvres, pas en triant en nous-mêmes, mais en prenant le tout de l'Histoire, histoire humaine qui devient histoire sainte.

           Pas d'une sainteté éthérée, nuageuse, auréolée. Mais d'une sainteté qui creuse avec ses pieds les sillons de notre terre jusque dans ses pleurs, ses larmes, sa soif de douceur, de justice et de paix, de miséricorde et de pureté. D'une sainteté qui prend tout, mais qui ne se contente pas de ce qui est là. D'une sainteté qui voit au-delà de ce qu'on voit, au-delà de l'aujourd'hui... ou plutôt qui voit dans l'aujourd'hui la présence inespérée du Créateur, tel un Père aimant et attirant tout à lui.

 

           Tous, ça veut dire tous les hommes. Pas uniquement les disciples reconnus de Jésus. Dire « tous », ça veut dire « tous ». Donc aussi les autres, ceux-là même qui ne connaissent parfois pas le Christ, ou qui ont adopté d'autres chemins pour rencontrer Dieu. Ceux-là aussi, et nous en connaissons, vivent le chemin de bonheur humble et profond auquel nous invite Jésus. Ceux-là aussi creusent les sillons de notre terre pour construire un monde plus humain, et faire advenir, alors même qu'il ne le reconnaissent pas forcément, le Royaume de Dieu.

          Tous saints. Et tout à l'heure, nous proclamerons dans le credo, croire en l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Église sainte... Communauté (et nous en sommes, nous ici rassemblés, la première unité, la première cellule) invitée à vivre en communauté les béatitudes. Entre nous. Pour devenir signe que cela est possible quand d'autres pourraient douter ou désespérer. Car si à travers les relations qui nous lient les uns aux autres, nous ne savons pas pleurer avec ceux qui pleurent, travailler à la dignité de tous, donner miséricorde à ceux qui en ont besoin, nous regarder avec un regard de pureté... Si nous n'arrivons pas à vivre entre nous déjà ce que notre foi en Christ nous invite à vivre, les autres n'auront-ils pas raison de désespérer ?

           Communauté vivant les béatitudes pour devenir signe que cette sainteté ne vient pas de nous, de nos seules forces humaines, trop fragiles. Mais de Dieu qui, en Jésus-Christ, accomplis pour nous ce chemin jusqu'à son but. Dans sa propre humanité il a vécu ce chemin de don et d'abandon, de communion jusqu'au pardon. La sainteté que nous proclamons est là, dans la confiance au Père et la vie dans l'Esprit Saint. Et dans l'espérance déjà visible que l'humanité court non à sa perte, mais à son but, attirée qu'elle est, mystérieusement, par ce désir profond de vivre en paix.

           Église sainte, entraînée par tous ces témoins de l'histoire aux mille facettes d'Evangile : Paul, Matthieu, Marc, Luc, Jean, et puis les figures de l’Antiquité, Irénée de Lyon et Justin de Rome ou Ignace d’Antioche, Augustin et Monique sa mère, Basile, Grégoire de Naziance et Athanase, Ambroise et Léon. Et puis les médiévaux : Bernard, François, Dominique, Claire d’Assise, Catherine de Sienne. Sans oublier les figures de la période moderne, Ignace de Loyola et Luther, Jean de la Croix et Thérèse d’Avila. Et, plus près de nous, par exemple, Charles de Foucauld, Pauline Jaricot, Martin Luther King, Mgr. Romero, mère Teresa, etc. Auxquels il faut ajouter tous ces chrétiens que l’on appelle laïcs et qui vivent ou ont vécu de l’Evangile sans être jamais distingués par les autorités ecclésiales, ces millions de gens oubliés de l’histoire mais qui, génération après génération, ont tissé une tradition et en ont assuré la variété. Et encore le témoignage contemporain des chrétiens d'aujourd'hui, témoignage bigarré, parfois un peu routinier et parfois brusquement ardent et imaginatif. L'Église sainte, composée des saints et des saintes de toutes les générations, de ceux qui sont partis, de ceux qui sont là et de ceux qui viendront, reçoit du Christ une parole décisive. Une parole qui donne une mission pour vivre cette sainteté : devenir prophétique. C'est là, dans la transpiration de l'ordinaire des jours, dans la fidélité au réel de chaque homme, dans le regard d'amour et de confiance, que nous sommes invités à la joie. La joie profonde du bonheur de celui qui sait qu'il a tout donné et qu'il s'est donné lui-même, autant que ses limites le peuvent.

           Tous saints. Regard d'espérance sur notre humanité, regard qui nous invite au travail de chaque jour non pour un bonheur futur, mais pour un bonheur du présent. Du présent de Dieu, du cadeau de Dieu qui s'offre lui-même à nos cœurs à chaque instant... présent du présent, cadeau de l'Aujourd'hui nous faisant entrer dans l'éternité. C'est ici et maintenant que Jésus nous offre sa Parole, son Pain et des frères à aimer. Et nous voilà devenus saints de cette sainteté qui va si bien aux affamés et aux assoiffés, aux pauvres de toutes les pauvretés et aux petits de notre temps. Tous saints parce que tous tendus du plus intime de nous-mêmes vers cet absolu qu'est Dieu, révélé en Jésus-Christ, cet absolu qu'est l'Homme ouvert et aimant, aimé et pardonné.

           La fête que nous propose l’Église aujourd'hui n'est pas fête des âmes au ciel, comme d'aucuns pourraient le croire. Elle est fête de notre condition humaine follement aimée de Dieu, d'un amour tel qu'il suffit à lui seul pour déployer en nous tout ce qui nous fait grandir et nous fait advenir.

           A chacun et à tous, belle fête de Toussaint, de tous saints.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

 


Lecture de l'Apocalypse de saint Jean

Moi, Jean, j'ai vu un ange qui montait du côté où le soleil se lève, avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ; d'une voix forte, il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer : « Ne dévastez pas la terre, ni la mer, ni les arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. » Et j'entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau : ils étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d'Israël.

Après cela, j'ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l'Agneau, en vêtements blancs, avec des palmes à la main. Et ils proclamaient d'une voix forte : « Le salut est donné par notre Dieu, lui qui siège sur le Trône, et par l'Agneau ! »
Tous les anges qui se tenaient en cercle autour du Trône, autour des Anciens et des quatre Vivants, se prosternèrent devant le Trône, la face contre terre, pour adorer Dieu. Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! »
L'un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Tous ces gens vêtus de blanc, qui sont-ils, et d'où viennent-ils ? »
Je lui répondis : « C'est toi qui le sais, mon seigneur. » Il reprit : « Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l'Agneau. »

Psaume : 23, 1-2, 3-4ab, 5-6


R/

Voici le peuple immense
de ceux qui t'ont cherché.


Au Seigneur, le monde et sa richesse,
la terre et tous ses habitants !
C'est lui qui l'a fondée sur les mers
et la garde inébranlable sur les flots.


Qui peut gravir la montagne du Seigneur
et se tenir dans le lieu saint ?

L'homme au cœur pur, aux mains innocentes,
qui ne livre pas son âme aux idoles.

Il obtient, du Seigneur, la bénédiction,
et de Dieu son Sauveur, la justice.

Voici le peuple de ceux qui le cherchent,
qui recherchent la face de Dieu !

2ème lecture : Nous sommes enfants de Dieu et nous lui serons semblables (1 Jn 3, 1-3)


Lecture de la première lettre de saint Jean

Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l'amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu — et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître : puisqu'il n'a pas découvert Dieu.
Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est. Et tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur.

Evangile : Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Quand Jésus vit la foule, il gravit la montagne. Il s'assit, et ses disciples s'approchèrent. Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. Il disait :
« Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise !
Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés !
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés !
Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde !
Heureux les cœurs purs : ils verront Dieu !
Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu !
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux serez-vous si l'on vous insulte, si l'on vous persécute et si l'on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l'allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux ! »

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19 octobre 2014 7 19 /10 /octobre /2014 11:00

 

 

           Le pape Paul VI, béatifié ce dimanche, glissait dans son discours de clôture du Concile Vatican II une déclaration des plus décapante : « L'Église du Concile, il est vrai, ne s'est pas contentée de réfléchir sur sa propre nature et sur les rapports qui l'unissent à Dieu : elle s'est aussi beaucoup occupée de l'homme, de l'homme tel qu'en réalité il se présente à notre époque […] La religion du Dieu qui s'est fait homme s'est rencontrée avec la religion (car c'en est une) de l'homme qui se fait Dieu. Qu'est-il arrivé ? Un choc, une lutte, un anathème ? Cela pouvait arriver ; mais cela n'a pas eu lieu. La vieille histoire du bon Samaritain a été le modèle et la règle de la spiritualité du Concile. Une sympathie sans bornes pour les hommes l'a envahi tout entier. […] Reconnaissez-lui au moins ce mérite, vous, humanistes modernes, qui renoncez à la transcendance des choses suprêmes, et sachez reconnaître notre nouvel humanisme : nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de l'homme. »

           Peut-être ne faisait-il que continuer la conversion à laquelle invitait Jésus dans sa rencontre avec les disciples des pharisiens et les partisans d'Hérode.

 

           « Cette effigie et cette légende, de qui sont-elles ? »

           Les disciples des pharisiens et les partisans d'Hérode ont dans leur poche la monnaie dédiée à l'impôt (autre que la monnaie juive ordinaire, qui ne porte aucune image d'animaux ou de personne, conformément à la Loi). Ils ont en leur poche la monnaie de l'impôt qui montre leur obéissance aux règles de l'empire, et par le moyen de laquelle ils veulent faire tomber Jésus. S'ils ont dans leur poche la monnaie qu'ils soupçonnent Jésus de refuser, ils se mettent eux-mêmes en faute. Et de découvrir l'imbroglio de la situation dans laquelle ils se mettent eux-mêmes.

           Mais la réponse de Jésus renverse ces logiques de mauvaise foi, d'attaque, de perversité. « Cette effigie et cette légende, de qui sont-elles ? » L'image renvoie à une autre réalité qu'elle-même. A quoi renvoie l'image de la pièce ? À l'empereur César. « Rendez-donc à César ce qui est à César. » Mais Jésus n'en reste pas là, il ouvre son enseignement et offre une visée plus grande : « Rendez à Dieu ce qui est à Dieu. »

            Quelle est l'image de Dieu qui pourrait renvoyer à Dieu ?

            Et nous voilà au cœur de la Bonne Nouvelle : l'Homme.

           Créé à l'image et à la ressemblance de Dieu. L'Homme, créé de toute éternité et à chaque génération selon le modèle de Jésus, « image du Dieu invisible », dira saint Paul, comme sommet de toute humanité. L'Homme, dans son unicité et dans l'immense tissu de relations humaines à travers le temps et l'espace. L'Homme dans sa capacité d'aimer et de servir, de rendre grâce et de louer. L'Homme dans sa diversité jusqu'en la communion de toute l'humanité. L'Homme : voilà l'image de Dieu à rendre à Dieu. L'Homme comme sommet de toute la création, rendu au Créateur, tandis que tout le reste n'est plus considéré que comme moyens.

           Voilà la Bonne Nouvelle qui court à travers toute l'histoire sainte. Cette Bonne Nouvelle n'est pas extérieure à nous-mêmes : elle est nouvelle de la beauté de l'Homme, de sa grandeur, de sa place dans l'univers. Ce même homme que nous, les hommes, abîmons si souvent, c'est vers lui que Dieu ordonne tout. Depuis les origines et en passant par Cyrus, ce roi païen que Dieu choisi pour rétablir la paix. « Je t'ai appelé par ton nom, je t'ai décerné un titre, alors que tu ne me connaissais pas ». Et jusqu'au Thessaloniciens, nos frères et sœurs en Christ : « Vous avez été choisis par Dieu », leur rappelle saint Paul « Vous » : vous et moi. Et tous les autres. Choisis, pour annoncer un temps de grâce et y travailler avec ardeur.

           La réponse de Jésus aux pharisiens et aux partisans d'Hérode ne permet pas d'opposer trop facilement ce que nous appellerions « le temporel » du « spirituel ». Mais elle redonne sa juste place à chaque réalité.

Aux moyens que nous inventons, que nous prenons, que nous choisissons, ne revient pas la place d'idoles. Et elles sont nombreuses, les idoles d'hier et d'aujourd'hui : argent, pouvoir (qu'il soit politique, associatif, ou même clérical!), travail, organisations, écrans, vitesse, et toutes les formes d'idoles que nous sommes capables d'imaginer et de mettre en place dans nos vies personnelles ou collectives. Ces moyens qui deviennent nos maîtres et dont nous devenons des esclaves à force de nous laisser faire par eux, transformer par eux, de nous adapter à eux... et de les implorer de toutes nos forces quand rien ne va plus.

           A contrario, l'Homme ne peut plus et ne doit plus être considéré comme un moyen. Image de Dieu, il ne peut être monnaie d'échange, considéré comme une marchandise, ou une variable d'ajustement, un problème, une ressource... Combien sont-ils nombreux ces exemples micro ou macro, en nos vies, en nos sociétés, en notre monde, qui défigurent l'image de Dieu qu'est l'Homme ? La journée mondiale du refus de la misère, que nous vivions ce 17 octobre, nous réveille brutalement sur la capacité que nous avons nous-mêmes à défigurer notre humanité... en ouvrant aussi des fenêtres sur nos capacités à tendre la main et à refuser toute indignité.

            Le seul « instrument » que l'Homme doit devenir, n'est-il pas l'instrument de l'amour, comme le suggérait dans sa prière le saint d'Assise ? Ne serait-ce pas la première et l'unique mission qui soit véritablement digne de toute humanité, faisant briller d'une clarté plus vive l'image de Dieu en notre monde, cette image reçue à notre naissance et renouvelée par notre baptême ? Façon unique de « rendre à Dieu ce qui est à Dieu », en rendant service, en rendant grâce, et en rendant raison de notre foi, de notre espérance et de notre charité. Vie rendue, vie offerte en retour, vie désappropriée pour vivre vraiment et librement. Cette vie qui témoigne de plus grand qu'elle-même, et qui met en lumière l’Évangile, « qui n'a pas été simple parole, mais puissance, action de l'Esprit Saint, certitude absolue. »

           Matthieu, l'apôtre dont tu portes le nom a vécu une conversion décisive en rencontrant Jésus. Et il est devenu porteur de cette Bonne Nouvelle, de l’Évangile qui est arrivée jusqu'à nous. Deviens toi aussi, à ta manière, porteur de cette Évangile, Bonne Nouvelle pour l'Homme d'aujourd'hui et pour tout homme !

           Et nous, regardons l'ordinaire de nos vies. Rendons à César ce qui est à César, sans amertume ni regret. Et par toute nos vies, «Chantez au Seigneur un chant nouveau, Rendez au Seigneur, familles des peuples, rendez au Seigneur la gloire et la puissance, rendez au Seigneur la gloire de son nom. »

          Amen.

P. Benoît Lecomte

 


Livre d'Isaïe 45,1.4-6.
Parole du Seigneur au roi Cyrus, qu'il a consacré, qu'il a pris par la main, pour lui soumettre les nations et désarmer les rois, pour lui ouvrir les portes à deux battants, car aucune porte ne restera fermée :
A cause de mon serviteur Jacob et d'Israël mon élu, je t'ai appelé par ton nom, je t'ai décerné un titre, alors que tu ne me connaissais pas.
Je suis le Seigneur, il n'y en a pas d'autre : en dehors de moi, il n'y a pas de Dieu. Je t'ai rendu puissant, alors que tu ne me connaissais pas,
pour que l'on sache, de l'orient à l'occident, qu'il n'y a rien en dehors de moi. Je suis le Seigneur, il n'y en a pas d'autre :



Psaume 96(95),1a.3.4-5b.7-8a.9a.10ac.
Chantez au Seigneur un chant nouveau,
racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !

Il est grand, le Seigneur, hautement loué,
redoutable au-dessus de tous les dieux :
Lui, le Seigneur, a fait les cieux.

Rendez au Seigneur, familles des peuples,
rendez au Seigneur la gloire et la puissance,
rendez au Seigneur la gloire de son nom.

adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté :
Allez dire aux nations : « Le Seigneur est roi ! »
Il gouverne les peuples avec droiture.







Première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens 1,1-5b.
Nous, Paul, Silvain et Timothée, nous nous adressons à vous, l'Église de Thessalonique qui est en Dieu le Père et en Jésus Christ le Seigneur. Que la grâce et la paix soient avec vous.
A tout instant, nous rendons grâce à Dieu à cause de vous tous, en faisant mention de vous dans nos prières.
Sans cesse, nous nous souvenons que votre foi est active, que votre charité se donne de la peine, que votre espérance tient bon en notre Seigneur Jésus Christ, en présence de Dieu notre Père.
Nous le savons, frères bien-aimés de Dieu, vous avez été choisis par lui.
En effet, notre annonce de l'Évangile chez vous n'a pas été simple parole, mais puissance, action de l'Esprit Saint, certitude absolue : vous savez comment nous nous sommes comportés chez vous pour votre bien.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 22,15-21.
Les pharisiens se concertèrent pour voir comment prendre en faute Jésus en le faisant parler.
Ils lui envoient leurs disciples, accompagnés des partisans d'Hérode : « Maître, lui disent-ils, nous le savons : tu es toujours vrai et tu enseignes le vrai chemin de Dieu ; tu ne te laisses influencer par personne, car tu ne fais pas de différence entre les gens.
Donne-nous ton avis : Est-il permis, oui ou non, de payer l'impôt à l'empereur ? »
Mais Jésus, connaissant leur perversité, riposta : « Hypocrites ! pourquoi voulez-vous me mettre à l'épreuve ?
Montrez-moi la monnaie de l'impôt. » Ils lui présentèrent une pièce d'argent.
Il leur dit : « Cette effigie et cette légende, de qui sont-elles ? -
De l'empereur César », répondirent-ils. Alors il leur dit : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »

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17 octobre 2014 5 17 /10 /octobre /2014 14:56

 

 

Recevoir un carton d'invitation... quoi de plus agréable ! (aux enfants) Vous vous rappelez quand vous avez reçu le carton d'invitation pour venir au caté il y a 15 jours... vous avez ouvert l'enveloppe, découvert le petit mot... quelqu'un avait pensé à vous, voulait vous rencontrer... faire la fête avec vous, vous offrir un goûter, partager un moment joyeux... la signature n'était pas très claire, mais ça faisait envie ! Alors vous avez répondu et vous êtes venus.

En général, on a plutôt plaisir à recevoir les invitations. Pour les anniversaires, les vacances, les soirées... et surtout quand elles viennent de Dieu lui-même ! Comme dans le livre d'Isaïe, où Dieu prépare « pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, un festin de viandes succulentes et de vins décantés. » Un énorme banquet ouvert à tous les hommes de tous les pays... voilà une invitation difficile à refuser.

Dans l'évangile qu'on vient d'entendre, le roi invite aux noces de son fils. Le mariage du fils du roi... on imagine la fête que ça doit être ! Et invités par le roi ! Pourtant, les invités refusent. Chacun trouve une excuse et les invités sont tellement en colère, ils ne voient tellement pas la chance qu'ils ont, qu'ils vont jusqu'à tuer les serviteurs du roi. Alors le roi, change de liste d'invités : il demande à ces serviteurs d'aller « aux croisées des chemins » et d'inviter tous ceux qu'ils vont rencontrer, les bons comme les méchants. Ce que veut ce roi, c'est d'abord que la salle de noce soit remplie de convives.

Cette petite parabole nous raconte quelque chose de la relation entre Dieu et les hommes, entre Dieu et nous. Elle nous dit que Dieu invite tout le monde : ceux qu'il a prévus, comme ceux qu'il n'a pas prévus, peu importe. Tout le monde, tous les hommes sont invités à entrer dans la joie de la fête que Dieu propose. Mais il ne nous impose rien. L'homme (nous) peut refuser, ou accepter. Il en va de notre liberté. Nous pouvons nous enfermer dans nos petites activités quotidiennes, ne plus voir personne, nous couper de tout et nous couper de Dieu... ou nous pouvons entrer dans la relation qu'il nous propose de vivre avec lui, et en vivre joyeusement, comme dans une fête.

Or cette fête n'est pas n'importe quelle fête : elle est la fête des noces, fête d'un mariage. Fête de l'Alliance. Fête de l'Amour. C'est bien à cela que nous invite Dieu : à entrer dans la joie de l'Amour. A chacun, alors, de répondre librement : veux-tu vivre de l'Amour que Dieu te propose, un Amour infini et inconditionnel, ou préfères-tu baisser la tête, regarder tes pieds et ne pas sortir de chez toi ?

Cette histoire pourrait paraître très abstraite... mais avec elle, Jésus nous parle du « Royaume des cieux ». Il ne nous parle donc pas de quelque chose de très lointain, mais du monde dans lequel nous voulons vivre, ou plutôt du monde que nous voulons construire en lien avec le projet de Dieu pour nous. Cette histoire de noces, c'est chaque jour, à chaque instant qu'elle se reproduit. A chaque instant, à chaque fois que tu as le choix, tu peux accepter de participer à la fête de l'amour, ou refuser.

A chaque instant, ça veut dire en famille, à l'école, au travail, en Église, dans nos engagements, dans toutes nos relations... que l'on soit en forme ou malade, jeune ou vieux, croyant ou incroyant (puisque Dieu invite finalement tous les peuples de toutes les nations),... partout où Dieu peut nous faire signe - et il peut nous faire signe partout - il en va de notre décision de répondre à son invitation, ou pas. Et de construire un monde de communion, d'entente, de justice, de paix... « Il enlèvera le voile de deuil qui enveloppait tous les peuples et le linceul qui couvrait toutes les nations. Il détruira la mort pour toujours. Le Seigneur essuiera les larmes sur tous les visages, et par toute la terre il effacera l'humiliation de son peuple ; c'est lui qui l'a promis », disait Isaïe.

 

Une autre chose encore, qui jaillit de cette parole et qui éclaire ce que nous vivons ce matin. Notre eucharistie n'est finalement pas autre chose qu'une préfiguration de ce festin immense, au cours duquel Dieu renouvelle l'Alliance avec l'humanité en célébrant les noces de son Fils. « Heureux les invités au festin du Seigneur, voici l'agneau de Dieu », entendrons-nous tout à l'heure, quand le prêtre nous présentera l'hostie consacrée, devenue corps du Christ. Et tous, invités des quatre coins de l'horizon, nous pourrons prendre part à ce repas comme à un banquet de noces, célébrées dans cette eucharistie qui n'en fini pas de partager le pain depuis 2000 ans, prémisse du banquet éternel que nous attendons. L'eucharistie est une anticipation de ce qui nous attend et qui nous est promis ! Royaume des cieux déjà en marche au creux de notre histoire... à la mesure où nous répondons à l'invitation toujours étonnante de Dieu.

 

Ne soyons pas blasés de cette invitation. Ne nous habituons pas trop vite à nos rituels, à nos prières, à nos sacrements, à nos liturgies, à nos discours, à nos évangiles, à la Parole de Dieu, à la présence du Christ... ne faisons pas comme si tout était normal : il n'est pas « normal », mais extraordinaire que le roi invite ainsi les tout-venants. Il n'est pas « normal » que nous soyons rassemblés ce soir pour célébrer l'eucharistie. Il y a là une grâce extraordinaire, une force immense d'amour et de transformation de nos vies et du monde. Sachons reconnaître la chance que nous avons, et apprenons à en témoigner par nos paroles et d'abord par nos vies à accorder jour après jour à ce mystère. La noce ne se fera pas sans nous, le royaume des cieux a besoin de notre consentement et de notre participation. Soyons joyeux d'avoir été invités par le Seigneur, vivons de cette joie et transmettons-là à notre monde, qui l'attend... impatiemment.

Amen.

P. Benoît Lecomte


Livre d'Isaïe 25,6-10a.
Ce jour-là, le Seigneur, Dieu de l'univers, préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, un festin de viandes succulentes et de vins décantés.
Il enlèvera le voile de deuil qui enveloppait tous les peuples et le linceul qui couvrait toutes les nations.
Il détruira la mort pour toujours. Le Seigneur essuiera les larmes sur tous les visages, et par toute la terre il effacera l'humiliation de son peuple ; c'est lui qui l'a promis.
Et ce jour-là, on dira : « Voici notre Dieu, en lui nous espérions, et il nous a sauvés ; c'est lui le Seigneur, en lui nous espérions ; exultons, réjouissons-nous : il nous a sauvés ! »
Car la main du Seigneur reposera sur cette montagne.



Psaume 23(22),1-2ab.2c-3.4.5.6.
Le Seigneur est mon berger :
je ne manque de rien.
Sur des prés d'herbe fraîche,
il me fait reposer.

Il me mène vers les eaux tranquilles,
et me fait revivre ;
il me conduit par le juste chemin
pour l'honneur de son nom.

Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi,
ton bâton me guide et me rassure.

Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis ;
Tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante.

Grâce et bonheur m'accompagnent
tous les jours de ma vie.
J'habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.  




Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 4,12-14.19-20.
Frères, je sais vivre de peu, je sais aussi avoir tout ce qu'il me faut. Être rassasié et avoir faim, avoir tout ce qu'il me faut et manquer de tout, j'ai appris cela de toutes les façons.
Je peux tout supporter avec celui qui me donne la force.
Cependant, vous avez bien fait de m'aider tous ensemble quand j'étais dans la gêne.
Et mon Dieu subviendra magnifiquement à tous vos besoins selon sa richesse, dans le Christ Jésus.
Gloire à Dieu notre Père pour les siècles des siècles. Amen.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 22,1-14.
Jésus disait en paraboles :
« Le Royaume des cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils.
Il envoya ses serviteurs pour appeler à la noce les invités, mais ceux-ci ne voulaient pas venir.
Il envoya encore d'autres serviteurs dire aux invités : 'Voilà : mon repas est prêt, mes bœufs et mes bêtes grasses sont égorgés ; tout est prêt : venez au repas de noce. '
Mais ils n'en tinrent aucun compte et s'en allèrent, l'un à son champ, l'autre à son commerce ;
les autres empoignèrent les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent.
Le roi se mit en colère, il envoya ses troupes, fit périr les meurtriers et brûla leur ville.
Alors il dit à ses serviteurs : 'Le repas de noce est prêt, mais les invités n'en étaient pas dignes.
Allez donc aux croisées des chemins : tous ceux que vous rencontrerez, invitez-les au repas de noce. '
Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu'ils rencontrèrent, les mauvais comme les bons, et la salle de noce fut remplie de convives.
Le roi entra pour voir les convives. Il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce,
et lui dit : 'Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ? ' L'autre garda le silence.
Alors le roi dit aux serviteurs : 'Jetez-le, pieds et poings liés, dehors dans les ténèbres ; là il y aura des pleurs et des grincements de dents. '
Certes, la multitude des hommes est appelée, mais les élus sont peu nombreux. »



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5 octobre 2014 7 05 /10 /octobre /2014 11:00

 

Matthieu-21-33-43.jpg

           Il est des choses que l'on aime et que l'on fait avec une extrême minutie, dont on prend soin avec une immense attention, une grande délicatesse. Le Dieu de la Bible est comme cela avec son peuple, tel le propriétaire d'une vigne. Quelle prévenance ! Quelle ténacité ! Quels soins pour elle ! Tel un homme éperdument amoureux de sa bien-aimée, qui pense à tout, qui anticipe tout, qui donne tout... Mais contre toute attente et malgré cette attention, la vigne donne de mauvais fruits. La vigne : le peuple élu, nous dit-on, celui en qui Dieu a mis sa confiance. Celui qui a reçu la charge de dire aux autres peuples de quel amour Dieu aime. Ce peuple qui avait reçu la loi et les prophète en cadeaux. Ce peuple religieux, pratiquant, qui avait tout – qui avait Dieu – pour être heureux. Désespoir de Dieu, qui entraîne sa colère et sa violence. Dans Isaïe comme dans l’Évangile, ceux qui avaient tout ne rendent rien. Pas de retour. Échec de la relation. Ceux qui avaient reçu ont cru être propriétaires des dons, à en oublier le donateur. Les voilà aveuglés, enfermés, coupés de la source de leur vie. Entraînés vers la mort.

           La Parole de Dieu aujourd'hui est un coup de pied à l’Église que nous formons et dont nous nous réclamons. La présence et le désir de Dieu sont un coup de sécateur dans le cercle installé que nous croyons former. Nous, héritiers du peuple élu de la première alliance. Nous, rejetons de cette vigne qui n'a pas su accueillir l'amour jusqu'au bout. A nous qui sommes toujours tentés de retomber dans les travers de nos aïeuls, il nous est rappelé que nous ne sommes propriétaires de rien, encore moins de Dieu, ni de sa grâce, ni de son héritage. Et la liturgie de nous inviter à nous ouvrir, totalement, à Dieu prêt à confisquer le don préparé pour son peuple, pour le donner à un autre.

           Ce dimanche, s'ouvre une page sûrement importante de la vie de l’Église : le synode sur la famille. Le pape François l'a souhaité de longue date, et a surtout fait en sorte que l’Église toute entière s’attelle à la question de la réalité familiale (ou des réalités familiales). Chacun de nous, ici-même, avons pu participer en répondant au questionnaire qui nous était communiqué en janvier dernier. Et l'enjeu pastoral rejoint chacun, parce que nous sommes tous d'une famille, et que nous en connaissons tous la fragilité. Certains veulent focaliser la totalité des débats sur la question de l'accès des personnes divorcées et remariées aux sacrements. Bien sûr cette question est importante pour toutes celles et tous ceux qui sont concernés, et des réponses à l'emporte-pièce peuvent provoquer de grandes souffrances humaines et spirituelles. Il me semble pourtant que l'enjeu est bien plus large : il s'agit de prendre en considération nos familles, dans toute leur diversité. Toutes celles qui sont étrangères à la foi des apôtres. Toutes celles mouvants au gré des vents des sociétés. Toutes celles qui se trouvent éclatées, s'accrochant comme elles peuvent à des relations humaines si difficiles à tenir dans la durée, de l'enfant au vieillard, en passant par les couples si divers dans leurs façons de vivre, mais à l'histoire toujours sacrée. Il s'agit, à mon avis, de regarder la réalité de notre histoire humaine et de nos réalités familiales, de leur diversité de vie à la profondeur de leur unique désir : être liés les uns aux autres d'un amour filial et fraternel. Et, de ces réalités à ce désir, se laisser embrasser et embraser par la miséricorde de Dieu.

           Faut-il un seul modèle ? Y a-t-il jamais eu un seul modèle de famille, sinon dans l'imaginaire collectif ? Un modèle qu'on pourrait dire ou croire pur, parfait, lisse, sans aspérité ? Ne serait-ce pas se faire illusion ? Ne serait-ce pas s'enfermer, tels les vignerons de l'évangile, dans un schéma du coup hermétique à toute miséricorde et présence divine ? Il y a peut-être quelque chose de faux dans le fait de croire que des façons de vivre ou de s'organiser, révèlent davantage la grandeur de Dieu que d'autres. J'étais cette semaine avec 70 prêtres des cinq diocèses de la province de Poitiers en pèlerinage à l'ïle Madame. Moments de fraternité, de prière et d'échange, sur les pas des prêtres martyrs de la révolution. Et l'un des échanges a tourné autour de la question des épreuves que nous, prêtres, traversions. La question écrite proposait des pistes : « Vieillissement, difficultés familiales, incompréhensions et échecs dans le ministère pastoral, indifférence à l'égard de la foi, fatigues et usures, absence de relève, etc. »Tous ces exemples sentaient la nostalgie d'une Église et d'une société d'antant. Je me suis réjouis d'entendre les prêtres de mon petit groupe prendre le contre-pied de ces pensées, se rappelant que non pas nos communautés ou notre Église bien installée avec ses rites et sa morale, mais le monde tout entier est le champ de Dieu, qu'il en prend infiniment soin, et que les lieux de fracture, de perte, de creux, de recherche... sont autant de lieux de révélation de l'amour de Dieu, de sa présence, de sa fidélité. Oui, vraiment, « la pierre rejetée des bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C'est là l’œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux ! »

           Dieu ne peut pas être pour un entre-soi de purs, de pratiquants, de fidèles à la religion. Ceux-là y sont accrochés comme à un cadre et à des sécurités. Mais Dieu n'invite pas à s'enfermer, même dans une religion (et ceux qui tuent en son au nom, dans l'évangile comme dans l'actualité, sont de terribles contre exemples de l'appel infini à la vie que lance le Créateur). Dieu n'invite pas à s'enfermer entre gens qui se croiraient bien pensants. Le faire, se serait se faire reprendre le don promis. Au contraire, Dieu invite à une alliance. A un travail de collaboration. A une relation de don et de contre-don, de confiance et de retour. « Il donna sa vigne en fermage et partit en voyage »... il voulu « se faire remettre le produit de la vigne »... La déception de Dieu dans Isaïe et dans l’Évangile, malgré sa confiance et son pardon renouvelés, sont à la mesure de son désir de relation avec nous.

           Et si saint Paul ose dire aux Philippiens : « ce que vous avez appris et reçu, ce que vous avez vu et entendu de moi, mettez-le en pratique », il ne s'agit pas de sa part d'un excès d’orgueil ou de prétention, mais précisément d'une illustration toute humaine de cette pierre rejetée devenue pierre angulaire. Lui, le dernier, le petit, le persécuteur, ne peut s'enorgueillir que de la grâce reçue du Christ, de la miséricorde infinie dont il est l'objet, de l'action de Dieu au cœur même de ses errances.

           Vraiment, notre Dieu est tout-puissant de vie. N'enfermons pas cette puissance dans nos schémas tous faits... elle nous échapperait aussitôt. Mais au contraire, soyons signes de pardon et de miséricorde, de confiance et d'espérance, de joie et de paix, accueillant à toute réalité, pour la mener, avec nous-mêmes, sur le chemin de la vraie vie et du bonheur infini. Tel un peuple nouveau, heureux de vivre une relation magnifique et mystérieuse avec son Dieu. Dans l'action de grâce, dans le don de ce que nous sommes, dans l'offrande humble et confiante de nos existences. Vraiment, Dieu prend infiniment soin de nous, de chacun, quel qu'il soit. Source de paix.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

 

 


Livre d'Isaïe 5,1-7.
Je chanterai pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne. Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux.
Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais.
Et maintenant, habitants de Jérusalem, hommes de Juda, soyez donc juges entre moi et ma vigne !
Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n'ai fait ? J'attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais ?
Eh bien, je vais vous apprendre ce que je vais faire de ma vigne : enlever sa clôture pour qu'elle soit dévorée par les animaux, ouvrir une brèche dans son mur pour qu'elle soit piétinée.
J'en ferai une pente désolée ; elle ne sera ni taillée ni sarclée, il y poussera des épines et des ronces ; j'interdirai aux nuages d'y faire tomber la pluie.
La vigne du Seigneur de l'univers, c'est la maison d'Israël. Le plant qu'il chérissait, ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici l'iniquité ; il en attendait la justice, et voici les cris de détresse.



Psaume 80(79),9-10.13-14.15-16a.19-20.
La vigne que tu as prise à l'Égypte,
tu la replantes en chassant des nations.
Tu déblaies le sol devant elle,
tu l'enracines pour qu'elle emplisse le pays.

Pourquoi as-tu percé sa clôture ?
Tous les passants y grappillent en chemin ;
le sanglier des forêts la ravage
et les bêtes des champs la broutent.

Dieu de l'univers reviens !
Du haut des cieux, regarde et vois :
visite cette vigne, protège-la,
celle qu'a plantée ta main puissante.

Jamais plus nous n'irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !
Seigneur, Dieu de l'univers, fais-nous revenir ;
que ton visage s'éclaire, et nous serons sauvés !




Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 4,6-9.
Frères, ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, dans l’action de grâce priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes.
Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer, gardera votre cœur et votre intelligence dans le Christ Jésus.
Enfin, mes frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d'être aimé et honoré, tout ce qui s'appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela, prenez-le à votre compte.
Ce que vous avez appris et reçu, ce que vous avez vu et entendu de moi, mettez-le en pratique. Et le Dieu de la paix sera avec vous.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 21,33-43.
Jésus disait aux chefs des prêtres et aux pharisiens : « Écoutez cette parabole : Un homme était propriétaire d'un domaine ; il planta une vigne, l'entoura d'une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde. Puis il la donna en fermage à des vignerons, et partit en voyage
Quand arriva le moment de la vendange, il envoya ses serviteurs auprès des vignerons pour se faire remettre le produit de la vigne.
Mais les vignerons se saisirent des serviteurs, frappèrent l'un, tuèrent l'autre, lapidèrent le troisième.
De nouveau, le propriétaire envoya d'autres serviteurs plus nombreux que les premiers ; mais ils furent traités de la même façon.
Finalement, il leur envoya son fils, en se disant : 'Ils respecteront mon fils. '
Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : 'Voici l'héritier : allons-y ! tuons-le, nous aurons l'héritage ! '
Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent.
Eh bien, quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ? »
On lui répond : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il donnera la vigne en fermage à d'autres vignerons, qui en remettront le produit en temps voulu. »
Jésus leur dit : « N'avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C'est là l'œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux !
Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit.


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28 septembre 2014 7 28 /09 /septembre /2014 20:37

 

 

raideurs.jpg          Ne ressemblons-nous pas bien souvent aux deux fils de l'évangile ? Un peu adolescents, un peu inconsistants, ce que nous disons et ce que nous faisons ne coïncide pas exactement. Il y a du jeu dans la cohérence que nous recherchons et que nous voulons pour nous-mêmes. La réconciliation, l'unité de toute notre personne n'est pas si simple à faire, le travail pour y parvenir nous fatigue parfois. Et nous risquons de nous lamenter sur nous-mêmes... ou sur les autres, en qui nous relevons les mêmes difficultés à tout articuler.

           La Parole de Dieu de ce jour vient nous réconforter. Non pas qu'elle relativiserait ces incohérences ou qu'elle les encouragerait au risque de mener, parfois, à la destruction intérieure ! Mais elle souligne que s'il y a du jeu, c'est qu'il y a du mouvement... et que ce mouvement, pourvu que nous le fassions dans le bon sens, nous permet de nous ajuster à la loi d'amour que Dieu nous invite à vivre. « Je ne désire pas la mort du méchant », lance Dieu dans le livre d'Ezéchiel. « Si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. » Autrement dit, Dieu espère en nous, jusqu'en notre péché. Dieu croit inlassablement que rien n'est jamais figé pour toujours, mais à celui qui écoute sa Parole, dans le secret de sa conscience, dans l'intimité de son intériorité, il est possible de changer de vie, de se laisser irriguer par cette présence divine et de se tourner vers la vie. Les prêtres et les anciens, dans l'évangile, se croient déjà justifiés, ils sont restés sourds au témoignage de Jean-Baptiste. Les publicains et les prostituées, qui eux savent qu'il y a un écart entre leur conduite et l'unité de leur vie, ont entendu les paroles du prophète et y ont cru. Moins raides que les prêtres et les anciens, ils ont pu changer de vie et s'attacher, certainement non pas d'un seul coup, mais en s'engageant sur un chemin, à suivre la volonté du Père qui est volonté de joie, de bonheur, de paix intérieure.

           Nous sommes parfois inspirés par ce que nous vivons... alors permettez moi une image qui me vient en tête. Suite à mes problèmes de dos il y a quelques mois, je me retrouve chez le kiné deux fois par semaine. Et que me fait-il travailler ? Le renforcement du dos, et les rotations. Sans vous ouvrir tout mon dossier médical, il me faut donc tout à la fois muscler le dos, et gagner toujours davantage en souplesse de mouvement et de rotation du bassin. Autrement dit, en finir, autant qu'on le pourra, avec les raideurs.

           La Parole de Dieu nous dit qu'il en est de même dans la vie spirituelle et humaine. Il faut en finir avec nos raideurs. Nous ne sommes pas, et personne n'est jamais totalement mauvais, ou totalement parfait. Et ce serait un drame que de se figer dans l'une ou l'autre posture, parce que l'une comme l'autre est mortifère. Au contraire, en découvrant la souplesse à laquelle nous sommes appelés, en nous renforçant dans la confiance en Dieu, par l'écoute de sa Parole, par les sacrements et la vie dans l'Esprit, nous pouvons nous tourner petit à petit vers celui qui réunifie nos vies et les réconcilie.

           Cette souplesse, en plus de donner cohérence à nos existences, nous fera nous découvrir sous un nouveau jour : l'autre n'est pas que ce que nous en voyons ou ce que nous en croyons. Il est capable de changement, de conversion, de mouvement. Et ce sont toutes nos relations qui s'en trouvent transformées. Comme le remarque déjà saint Paul : « Il est vrai que dans le Christ on se réconforte les uns les autres, on s'encourage dans l'amour, on est en communion dans l'Esprit, on a de la tendresse et de la pitié », nous invitant pourtant à aller encore plus loin : « ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments, recherchez l'unité... »

           C'est ainsi que nous laissons de la place pour le travail de Dieu en nous. Comme si c'était à l'intérieur même de ce jeu que nous déplorons, de ces incohérences que nous regrettons, que Dieu s’immisçait pour nous sauver de l'intérieur de nous-mêmes. N'est-ce pas jusque là qu'il est descendu, qu'il s'est abaissé, jusqu'en notre péché et jusqu'en notre mort ? N'a-t-il pas été jusque dans cet abîme de nous-mêmes pour nous relever d'entre les morts et nous pardonner ce que nous ne nous pardonnons pas à nous-mêmes ? Ne nous aime-t-il pas jusque là, lui qui a saisi le tout de notre humanité, le bon comme le mauvais, le glorieux comme le douloureux, le fort comme le faible, le beau comme le laid ? Mystère du Dieu de Jésus-Christ qui veut à tout prix nous sauver et qui, pour ça, nous aime jusqu'au bout. Mystère de l'amour de ce Dieu qui invite chacun à se tourner librement vers Lui et à le laisser faire, sans honte et en toute confiance.

           Et à ceux qui s'offrent les unes de l'actualité à cause des violences et des haines perpétrées soi-disant au nom de Dieu, à ceux qui sont eux-mêmes rongés par les violences qu'ils infligent aux autres, nous pouvons leur répondre. Non pas par la haine et la violence, mais par l'espérance et l'amour si désarmant. Par le Dieu de Jésus-Christ qui ne cesse de frapper à la porte du cœur jusqu'à ce que celui-ci ouvre. « Mon enfant, va travailler aujourd'hui à ma vigne », demande l'homme. Et le fils répondit : « Je ne veux pas ». Mais ensuite, s'étant repenti, il y alla. »

           Heureuse parabole qui nous invite à ne désespérer ni de nous-mêmes ni de personne, mais à entrer dans les dispositions du Christ lui-même, à découvrir que jamais le Seigneur tout-puissant ne se résigne au péché de l'homme, mais qu'il attend toujours, inlassablement, que l'homme trouve la voie de l'amour et de la tendresse... et qu'il vive.

           Amen.

P. Benoît Lecomte

 


Livre d'Ézéchiel 18,25-28.
Parole du Seigneur tout-puissant : Je ne désire pas la mort du méchant, et pourtant vous dites :
Si le juste se détourne de sa justice, se pervertit, et meurt dans cet état, c'est à cause de sa perversité qu'il mourra.
Mais si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie.
Parce qu'il a ouvert les yeux, parce qu'il s'est détourné de ses fautes, il ne mourra pas, il vivra.



Psaume 25(24),4-5ab.6-7.8-9.
Seigneur, enseigne-moi tes voies,
fais-moi connaître ta route.
Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi,
car tu es le Dieu qui me sauve.

Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse,
ton amour qui est de toujours.
Oublie les révoltes, les péchés de ma jeunesse ;
dans ton amour, ne m'oublie pas.

Il est droit, il est bon, le Seigneur,
lui qui montre aux pécheurs le chemin.
Sa justice dirige les humbles,
il enseigne aux humbles son chemin.




Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 2,1-11.
Frères, s’il est vrai que, dans le Christ, on se réconforte les uns les autres, si l’on s’encourage dans l’amour, si l’on est en communion dans l’Esprit, si l’on a de la tendresse et de la pitié,
alors, pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l'unité.
Ne soyez jamais intrigants ni vantards, mais ayez assez d'humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes.
Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de lui-même, mais aussi des autres.
Ayez entre vous les dispositions que l'on doit avoir dans le Christ Jésus :
lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu ;
mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement,
il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à mourir, et à mourir sur une croix.
C'est pourquoi Dieu l'a élevé au-dessus de tout ; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms,
afin qu'au Nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l'abîme, tout être vivant tombe à genoux,
et que toute langue proclame : « Jésus Christ est le Seigneur », pour la gloire de Dieu le Père.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 21,28-32.
Jésus disait aux chefs des prêtres et aux anciens : « Que pensez-vous de ceci ? Un homme avait deux fils. Il vint trouver le premier et lui dit : 'Mon enfant, va travailler aujourd'hui à ma vigne'.
Celui-ci répondit : 'Je ne veux pas. ' Mais ensuite, s'étant repenti, il y alla.
Abordant le second, le père lui dit la même chose. Celui-ci répondit : 'Oui, Seigneur ! ' et il n'y alla pas.
Lequel des deux a fait la volonté du père ? » Ils lui répondent : « Le premier ». Jésus leur dit : « Amen, je vous le déclare : les publicains et les prostituées vous précèdent dans le royaume de Dieu.
Car Jean Baptiste est venu à vous, vivant selon la justice, et vous n'avez pas cru à sa parole ; tandis que les publicains et les prostituées y ont cru. Mais vous, même après avoir vu cela, vous ne vous êtes pas repentis pour croire à sa parole.

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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 22:12

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           Je ne voudrais pas être ministre du travail, et je n'ai aucun diplôme en économie... mais il me semble, comme à beaucoup sûrement, que la méthode du maître du domaine dans l’Évangile n'est pas des plus subtile pour faire marcher l'économie. Il paraît bien plutôt encourager à l'oisiveté : il y a fort à parier que ceux qui ont travaillé toute la journée se feront embaucher le lendemain à la dernière heure, pour recevoir le même salaire. Et les règles de sa justice dépassent un peu les logiques que nous connaissons au risque de nous scandaliser, comme les ouvriers du jour.

           Pour autant, ce maître a des choses à nous apprendre sur la manière dont Dieu nous accompagne et est présent avec nous, sur le Royaume des cieux dont Jésus parle et que nous espérons.

           D'abord, il sort. Pas qu'une fois : toutes les trois heures. Il ne reste pas enfermé dans sa tour d'ivoire. Ce maître est l'image d'un Dieu qui ne s'est pas laissé enfermé dans son entité divine : il sort de lui-même, il vient nous rejoindre. « Lui qui était dans la condition de Dieu, n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu ; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur », dira Paul dans sa lettre aux Philippiens. « Le semeur est sorti pour semer », disait déjà la parabole du semeur à tous vents. Dieu sort de lui-même, comme le Fils est sorti du Père pour vivre à notre pas. Première leçon de cette parabole : le mouvement de Dieu est celui de la sortie. Belle leçon, à nous qui voulons si souvent faire entrer les gens dans nos organisations, nos schémas, nos églises, nos dogmes... Il n'y a d'ouvrier dans la vigne qu'en réponse à une sortie première.

           Ensuite, une fois sortie, ce maître embauche. Toute la journée, tous ceux qu'il rencontre. Il appelle au travail. Il ne regarde pas au CV, à la motivation, aux compétences, pas même au salaire : il embauche. Ceux qui sont au chômage savent le poids de l'acte d'embauche  : reconnaissance, ouverture d'un avenir, place dans la société, fierté de gagner sa vie... Combien autour de nous, et nous-mêmes parfois, souffrent de n'être jamais appelés, de rester transparents aux yeux des autres, d'être rejetés, oubliés... Dieu, lui, n'oublie personne dans son royaume. Il a besoin de tous. Ne croyons pas, au moins en Église, qu'un tel est moins important que tel autre ! Ce n'est pas la logique de Dieu, ce n'est pas sa façon de voir, de nous connaître. « Mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins », disait le Seigneur par la bouche d'Isaïe. Accueillons cette nouvelle leçon avec humilité. Ne passons pas à côté les uns des autres, encourageons-nous mutuellement à prendre notre part du travail à la mission ! Appelons, nous aussi ! Et n'imaginons pas que nous valons plus ou moins que les autres ! Tout le monde a sa place au travail de la vigne du royaume.

           Allons un peu plus loin. Le maître du royaume offre le salaire qu'il veut à chacun de ses ouvriers : une pièce d'argent. Et nous voudrions, dans notre logique marchande, que ceux qui ont travaillé davantage gagnent davantage. Mais quel est véritablement le salaire que Dieu peut verser ? N'est-ce pas d'abord et uniquement son amour ? Et comment quantifier raisonnablement l'amour de Dieu ? Comment pourrait-il donner davantage à l'un qu'à l'autre ? Croyons-nous que le pape serait plus aimé de Dieu que le brigand du coin ou que nous-mêmes ? Dieu n'aime-t-il pas chacun de ses enfants d'une manière unique et pleine, comme une mère aime chacun de ses enfants, ne divisant pas mais multipliant son amour ? Et si le maître, en fait, ne pouvait pas donner moins que tout ? Et s'il ne pouvait pas diviser sa pièce d'argent par jour ? Son amour quotidien, indivisible, est totalement offert à chacun.

           Nous pouvons être choqués par le procédé économique de ce maître. Mais si nous sommes choqués, c'est sûrement parce que nous nous mettons à la place des ouvriers de la première heure. Humblement, nous pouvons aussi reconnaître que nous sommes ceux de la dernière heure, marqués par l'oisiveté, le découragement du jour, la perte de confiance, le rejet, le manque d'amour ou l'amour tordu... le péché. Mais alors, nous comprenons que nous sommes aimés infiniment par Dieu, même si nous sommes le dernier des derniers. N'y a-t-il pas là une Bonne Nouvelle, la Bonne Nouvelle du Royaume ? Nous comprenons que Dieu ne regarde pas à nos capacités ou nos incapacités, à notre rendement, à notre production. Nous comprenons que Dieu ne nous regarde pas comme un outil, une « ressource humaine », mais comme un homme, une femme, qu'il aime. Simplement parce que nous sommes là, que nous acceptons d'entendre sa parole et son invitation à nous mettre en route et à travailler à son projet d'amour pour l'humanité, sa vigne. Joie, alors, pour nous, que de nous savoir aimés par Dieu comme si nous étions « les premiers » ! D'ailleurs, pourquoi nous comparer avec les autres, ce serait perte de temps. Mais d'accueillir l'amour de Dieu pour nous, qui nous donne tout ce qu'il est. De l'accueillir comme une plénitude pour chaque jour, un don fait à chacun.

           Comme Paul, « l'avorton », « le dernier des apôtres », arrivé et appelé après tous les autres, qui a répondu présent et qui s'est mis à proclamer la Bonne Nouvelle du Christ : à faire « un travail utile », dit-il, auprès des communautés où il était envoyé. Comme Paul qui a compris que ce travail n'était pas un travail comme les autres, rétribué comme les autres par un salaire en espèces, mais une histoire d'amour avec un peuple, au nom du Christ. Et une histoire d'amour du Christ, partagée avec un peuple. Ne serait-ce pas cela, le travail auquel Dieu nous appelle tous ? Aimer le Christ et aider les hommes à aimer le Christ ? Y a-t-il plus beau salaire que de voir l'amour grandir ? Y a-t-il plus grande joie que d'être témoins du pardon de Dieu, de sa grandeur, de sa justice, de ses pensées, de ses chemins ?

           Le maître du domaine a sûrement une autre logique que tous les ministres du travail et de l'économie du monde. Mais cette logique est aussi plus puissante, plus sûre, plus belle, parce qu'elle est logique d'amour, de don, de pardon.

Apprenons du maître du domaine. Apprenons à entrer dans sa dynamique, personnellement et en Église. Apprenons à entrer dans la dynamique de l'amour de Dieu donné en plénitude chaque jour, dans « sa grandeur qui n'a pas de limite ».

           Amen.

P. Benoît Lecomte

 


Livre d'Isaïe 55,6-9.
Cherchez le Seigneur tant qu'il se laisse trouver. Invoquez-le tant qu'il est proche.
Que le méchant abandonne son chemin, et l'homme pervers, ses pensées ! Qu'il revienne vers le Seigneur qui aura pitié de lui, vers notre Dieu qui est riche en pardon.
Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins, déclare le Seigneur.
Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus des vôtres, et mes pensées, au-dessus de vos pensées.



Psaume 145(144),2-3.8-9.17-18.
Chaque jour je te bénirai,
je louerai ton nom toujours et à jamais.
Il est grand, le Seigneur, hautement loué ;
à sa grandeur, il n'est pas de limite.

Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d'amour ;
la bonté du Seigneur est pour tous,
sa tendresse, pour toutes ses œuvres.

Le Seigneur est juste en toutes ses voies,
fidèle en tout ce qu'il fait.
Il est proche de ceux qui l'invoquent,
de tous ceux qui l'invoquent en vérité.




Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 1,20c-24.27a.
Frères, soit que je vive, soit que je meure, la grandeur du Christ sera manifestée dans mon corps.
En effet, pour moi, vivre c'est le Christ, et mourir est un avantage.
Mais si, en vivant en ce monde, j'arrive à faire un travail utile, je ne sais plus comment choisir.
Je me sens pris entre les deux : je voudrais bien partir pour être avec le Christ, car c'est bien cela le meilleur ;
mais, à cause de vous, demeurer en ce monde est encore plus nécessaire.
Quant à vous, menez une vie digne de l'Évangile du Christ.



Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 20,1-16a.
Jésus disait cette parabole : « Le Royaume des cieux est comparable au maître d'un domaine qui sortit au petit jour afin d'embaucher des ouvriers pour sa vigne.
Il se mit d'accord avec eux sur un salaire d'une pièce d'argent pour la journée, et il les envoya à sa vigne.
Sorti vers neuf heures, il en vit d'autres qui étaient là, sur la place, sans travail.
Il leur dit : 'Allez, vous aussi, à ma vigne, et je vous donnerai ce qui est juste. '
Ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers midi, puis vers trois heures, et fit de même.
Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d'autres qui étaient là et leur dit : 'Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ? '
Ils lui répondirent : 'Parce que personne ne nous a embauchés. ' Il leur dit : 'Allez, vous aussi, à ma vigne. '
Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : 'Appelle les ouvriers et distribue le salaire, en commençant par les derniers pour finir par les premiers. '
Ceux qui n'avaient commencé qu'à cinq heures s'avancèrent et reçurent chacun une pièce d'argent.
Quand vint le tour des premiers, ils pensaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun une pièce d'argent.
En la recevant, ils récriminaient contre le maître du domaine :
'Ces derniers venus n'ont fait qu'une heure, et tu les traites comme nous, qui avons enduré le poids du jour et de la chaleur ! '
Mais le maître répondit à l'un d'entre eux : 'Mon ami, je ne te fais aucun tort. N'as-tu pas été d'accord avec moi pour une pièce d'argent ?
Prends ce qui te revient, et va-t'en. Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi :
n'ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon bien ? Vas-tu regarder avec un œil mauvais parce que moi, je suis bon ? '
Ainsi les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. »

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